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Re: Re: Logiciels de chez nous. Brevets XML, Microsoft



Salut,

En réponse à Étienne, et pour développer,

Je ne me sens pas menacé à court terme par les demandes de
brevets de MS. Les quelques demandes que j'ai vues
viseraient effectivement davantage OpenOffice. D'ailleurs il
y a un fil de discussion pas mal élaboré sur la liste "dev"
"marketing" de OpenOffice.org à ce sujet.

Si j'ai fait le lien avec mon projet dans le courriel, c'est
circonstanciel.

C'est au niveau du principe que ce genre de demande de
brevets me choque. Le site de l'Office de la propriété
intellectuelle du Canada (OPIC) mentionne qu'un programme
n'est pas brevetable, mais devrait tomber sous la loi des
droits d'auteurs. Une crainte légitime est que l'OPIC
devienne plus souple, si elle ne l'est pas déjà, pour imiter
les EU dans un contexte de "bon voisinage", comme certains
bureaux de brevets européens le feraient déjà.

Qu'on parle de "process" ne change rien à la question. Le
"process" est la structure du programme. Ce sont des ordres
donnés à une machine. Ce n'est pas un dispositif. Autant
breveter une recette de cuisine (je ne dis pas que ça ne
requiert pas de la créativité!).

La cerise sur le sundae, c'est que les demandes que j'ai
lues me paraissent plutôt triviales.

Autrement dit, ces deux facteurs, non-brevetabilité de
principe et caractère évident de l'"invention", font que
plusieurs de ces demandes de brevets, à mon avis, n'auraient
même pas dû être déposées, encore moins publiées, en tout
cas au Canada. Mais je ne suis pas expert dans le domaine
des brevets.

Malgré ce que j'ai dit, si un brevet comme "Système et
méthode pour transmettre un message à un programme" était
accordé, plusieurs logiciels pourraient être concernés,
particulièrement si on interprète la méthode indépendamment
de son enveloppe XML.

En outre, pour ce brevet en particulier, le "dessin
représentatif" est une déclaration en langage de
programmation ou pseudo-code. Tant qu'à y être, pourquoi ne
pas breveter la syntaxe de l'impératif, en français, parce
que c'est un dispositif qui permet de faire exécuter des tâches.

Comme je l'écrivais, MS n'est pas la seule compagnie
concernée par les brevets relatifs à XML. La semaine passée,
en donnant comme mot clé XML dans la banque des brevets de
l'OPIC, on obtenait 256 entrées. Dans certains cas, XML
semblait s'intégrer dans un dispositif matériel. Ça a peut
être un peu plus de chances d'être acceptable.

XML n'est qu'un cas particulier, tout comme MS. C'est toute
la question des brevets concernant des processus,
algorithmes, structures de données, structures
mathématiques, spécifications de langage, et ainsi de suite,
qui est soulevée. Bref, tout ce qui sert de support à
l'expression d'un informaticien...

Alors, quel peut être le motif pour déposer une demande de
brevet sur quelque chose qui semble non brevetable au
Canada, et qui n'a pas l'air original? Le demandeur pouvait
difficilement ne pas le savoir, ou nous ne vivons pas sur la
même planète, ou je n'ai pas compris.

J'ai lu sur un fil de discussion (je crois que c'est celui
sur openoffice.org dont je parlais plus haut) qu'un brevet
dispose d'une certaine protection dès la publication
initiale, avant d'être accordé, en tout cas aux EU. Et qui
dit protection dit frais de cour pour les personnes
éventuellement menacées de poursuite, même si la demande de
brevet est frivole.

Un individu qui développe du logiciel dans ses temps libres
n'a pas les moyens d'une telle défense (il pourrait
difficilement soutenir ses propres brevets, vu la taxe
annuelle qui est demandée!). Une PME ne pourrait pas non
plus soutenir une telle défense contre une multinationale,
et une organisation comme OpenOffice.org pourrait
difficilement le faire d'elle-même.

De savoir que je pourrais concevoir par mégarde un processus
ou une structure déjà couvert par un brevet, que je
risquerais d'être éventuellement poursuivi pour cela, et que
je serais coincé faute de moyens, avec la bénédiction
indirecte du gouvernement qui a accordé le brevet, ça, c'est
une atteinte à ma liberté. 

De savoir que des individus ont le droit d'être créatifs,
mais qu'ils pourraient devoir conserver ces créations pour
eux, au risque qu'elles contiennent des éléments brevetés,
sous peine d'être pénalisés financièrement, c'est une
atteinte au droit de former une communauté.

Et alors qu'il y a 20 ou 30 ans, les États occidentaux se
sont donnés de chartes et de lois pour protéger les citoyens
contre les abus des pouvoirs nationaux, publics ou privés
(avec l'exception notable des EU), je ne vois pas
grand-chose pour nous protéger des pouvoirs privés
transnationaux.

Des compagnies dont la capitalisation boursière dépasse le
budget du Québec ont probablement davantage d'influence sur
nos gouvernements que nous, que ce soit directement ou par
le biais de gouvernements étrangers, et certainement les
moyens d'utiliser à meilleur escient les outils juridiques
qui devraient normalement servir les citoyens.

C'est peut-être de la parano. Mais en matière de mauvaises
surprises, il y a des précédents, à l'exemple des
réclamations d'Unisys qui ont pratiquement mené le format
GIF dans les oubliettes d'Internet (je ne porte pas de
jugement sur la légimité de ce brevet en particulier!).


Patrice